Les déterminants sociaux de la santé
Qu’est-ce qui affecte l’état de santé des populations, notamment des Québécois?
Pourquoi l’espérance de vie de personnes vivant dans certains quartiers est-elle moins élevée que celle de personnes vivant dans d’autres quartiers d’une même ville?
Comment les inégalités en matière de santé se répercutent-elles sur la charge de travail et le quotidien des professionnelles en soins?
Comment une professionnelle en soins peut-elle agir pour améliorer l’état de santé de la population?
Les réponses à ces questions sont d’une grande importance parce que nous sommes citoyennes, militantes, parents et professionnelles en soins. Agir collectivement sur les déterminants de la santé influence grandement l’état de santé de la population en général et des personnes que nous soignons.
Caractéristiques individuelles
Orientation sexuelle et identité de genre
Les personnes de la diversité sexuelle peuvent vivre des stress sociaux comme la stigmatisation, les préjugés et la discrimination. Ces sentiments négatifs et de rejet affectent leur santé.
Statut autochtone
L’espérance de vie des personnes autochtones est en moyenne 14 ans plus basse que celle des non-autochtones. Savez-vous pourquoi?
Appartenance à un groupe ethnoculturel et racisme
Une personne appartenant à un groupe ethnoculturel peut avoir davantage de problèmes de santé qu’une personne blanche. Qu’est-ce qui explique ce phénomène?
Environnement physique
Qualité de l’air et de l’eau
La qualité de l’eau est un facteur de santé important. Sa qualité microbiologique et chimique est un enjeu permanent de santé publique, que ce soit lorsqu’il s’agit de consommation (eau potable), d’utilisation aux fins d’hygiène, aux fins de loisirs (eaux récréatives) ou à d’autres usages pouvant entraîner une exposition humaine.
Le logement
Le logement a une incidence sur la santé et le bien-être des personnes, tant sur les plans physique, mental et social.
Aménagement du territoire
La qualité de vie et la santé physique et mentale de la population comportent plusieurs dimensions. Elles varient grandement selon la façon dont les villes et les villages se sont développés, selon que l’on vive en milieu rural ou en milieu urbain.
Environnement social
Réseaux de soutien social
Les réseaux de soutien social comprennent les amis, la famille et la collectivité qui peuvent offrir du soutien émotionnel, de l’information, des ressources matérielles et des services. Ces personnes agissent comme coussin protecteur contre l’adversité, contribuent à la résolution de problèmes, donnent une impression de maîtrise et offrent des ressources pour améliorer la qualité de vie.
Éducation et alphabétisme
Une éducation de qualité est à la base de la santé et du bien-être et joue un rôle majeur dans la prévention des maladies.
Environnement économique
Emploi et conditions de travail
L’emploi conditionne grandement le rythme de vie et l’environnement dans lequel une personne évolue. Une partie importante de la journée d’une personne est effectivement consacrée au travail.
Le revenu
Les effets des inégalités économiques, spécifiquement de la pauvreté, se ressentent sur la santé des personnes. Autrement-dit, plus le niveau de revenu est bas, plus la santé d’une personne est mauvaise.
L’insécurité alimentaire
L’insécurité alimentaire, c’est l’état dans lequel se trouve une personne, ou un groupe de personnes, lorsque la disponibilité d’aliments sains et nutritifs ou la capacité de se procurer ces aliments est limitée ou incertaine. Cet état peut avoir d’importantes conséquences sur la santé.
Système de santé et de services sociaux
Système de santé et services sociaux
La gratuité et l’accessibilité d’un système de santé sont des déterminants de la santé majeurs. En effet, les données de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) nous permettent de constater que, dans les pays qui offrent des soins gratuitement, comme le Canada, l’espérance de vie est meilleure que dans des pays où certaines personnes n’ont pas accès aux soins, faute d’un revenu suffisant.
Même si les questions d’identité de genre, d’orientation sexuelle et d’expression de genre sont de plus en plus courantes et acceptées dans la société québécoise, ces notions sont encore bien souvent mal comprises. Voici des définitions utiles pour mieux les apprivoiser:
L’identité de genre est l’idée intime et personnelle que chacun a de son genre. C’est le sentiment d’être une femme, un homme, les deux, ni l’un ni l’autre ou de se situer à un autre point dans le spectre des genres. L’identité de genre d’une personne peut correspondre ou non au genre qui lui a été attribué à la naissance. La compréhension qu’une personne a de son genre peut changer.
L’expression de genre est la manière dont une personne s’exprime ou se présente elle-même qui peut être associée à son genre, y compris la manière dont une personne est perçue en lien avec son genre. Cela peut inclure son comportement et son apparence, comme ses choix vestimentaires, sa coiffure, le port de maquillage, son langage corporel, ses manières, sa démarche et sa voix. De plus, l’expression de genre inclut couramment le choix d’un nom et d’un pronom pour se désigner. La manière utilisée par une personne pour exprimer son genre peut changer.
L’orientation sexuelle est l’attirance physique, amoureuse ou émotionnelle d’une personne envers les personnes du genre opposé, du même genre, d’aucun genre ou de plus d’un genre, ou encore le fait d’entretenir des relations intimes avec ces personnes. La compréhension qu’a une personne de son orientation sexuelle peut changer.
Le sexe, quant à lui, est un état attribué à la naissance qui s’appuie sur des marqueurs biologiques du sexe, notamment l’anatomie reproductive et sexuelle ainsi que les chromosomes. Le sexe est habituellement désigné par les termes masculin ou féminin. Le terme « sexe » peut également faire référence au terme « intersexué ».
Comment l’orientation sexuelle et l’identité de genre peuvent-elles affecter la santé?
Selon les résultats d’une étude réalisée par Statistique Canada parue en novembre 2019, les groupes issus de la diversité sexuelle ont une moins bonne santé mentale que les personnes hétérosexuelles. Ces résultats soutiennent le nombre croissant d’études ayant relevé de telles disparités, soit que les gais, les lesbiennes et les personnes bisexuelles sont plus susceptibles de faire une dépression, d’éprouver de l’anxiété, d’être dans un état suicidaire et d’abuser de l’alcool ou de drogues que leurs homologues hétérosexuels. Les stress sociaux que vivent les populations de la diversité sexuelle, comme la stigmatisation, les préjugés et la discrimination, en plus des sentiments internalisés de négativité et des attentes de rejet, sont considérés comme un facteur expliquant partiellement les différences de risques de troubles mentaux.
Par ailleurs, le climat de travail et les microagressions contribuent également à créer des milieux de travail hostiles qui affectent la santé physique et psychologique des personnes qui les subissent. C’est le cas de certaines personnes de la diversité sexuelle et de genre qui voient leur santé et leur estime de soi se détériorer dans ces situations de stigmatisation, d’intimidation et d’exclusion au travail.
Un sondage Léger Marketing commandé par la Fondation Émergence a révélé que 35 % des Québécois-e-s ont subi au moins une situation de harcèlement psychologique ou sexuel en milieu de travail dans les cinq dernières années. La statistique grimpe à 65 % chez les personnes LGBTQ+. Elles ont notamment été plus nombreuses à recevoir des avances non désirées, à faire l’objet de blagues offensantes ou à subir des insultes et de la moquerie.
Au cours des dernières décennies, des avancées importantes ont été faites afin que les notions de sexe, de genre et d’orientation sexuelle ne soient plus perçues selon le modèle binaire. De manière générale, la société tarde toutefois à prendre acte de ce changement de paradigme qui fait une large place à la diversité humaine.
Plusieurs personnes de la diversité sexuelle et de la pluralité des genres peuvent faire le choix de ne pas divulguer leur orientation sexuelle ou leur identité de genre de crainte de vivre de l’intimidation, de la discrimination et de la stigmatisation. Le fait qu’elles aient peur de les dévoiler peut compliquer certaines interventions où ces informations seraient nécessaires.
S’outiller
Comme parent, ami-e, proche ou professionnel-le de la santé, chacun-e peut être amené-e à vivre le dévoilement de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre d’une personne. Il est nécessaire d’éviter de penser de façon binaire : homme et femme, masculin et féminin, hétérosexuel et homosexuel. Cette pensée exclut, sous-estime ou ignore une portion de la population. Reconnaître et respecter la diversité permet d’améliorer la qualité de la relation d’aide et ainsi, agir sur la santé mentale, l’équité et la justice sociale.
Le fait que l’intimidation vécue par les personnes de la diversité sexuelle ou de genre puisse prendre ancrage dans une norme sociale implique qu’il faut aller au-delà des caractéristiques personnelles des auteur-trice-s d’intimidation pour mieux comprendre ce problème et le prévenir. Il faut s’intéresser à ce qui, dans la société, valorise de telles normes qui peuvent rendre acceptables dans certains milieux de telles attitudes et des comportements négatifs.
En tant qu’organisation syndicale prévenante, inclusive, exempte d’incivilité, de discrimination et de toutes formes d’intimidation, la FIQ prend position et soutient des groupes qui luttent pour les personnes issues de la diversité sexuelle et de genre.
Pour en savoir plus, vous pouvez consulter :
Guide d’information de la fondation Émergence : Intégrer les personnes trans en milieu de travail
Cas de figure
Pensons à un adolescent qui dissimule son orientation sexuelle ou son identité de genre et qui consulte pour un dépistage d’ITSS. S’il n’ose pas communiquer ses éléments à son ou sa professionnel-le de la santé, les tests pourraient être incomplets. S’il craint d’être rejeté par ses parents ou intimidé à l’école, il vivra beaucoup d’anxiété et il sera difficile d’en connaître la cause.
Pour les personnes aînées, qui ont vécu à une époque où l’homosexualité et la transidentité constituaient un crime passible d’emprisonnement, la divulgation peut s’avérer très difficile. Elles peuvent autant ressentir un soulagement de ne plus avoir à se cacher que de la stigmatisation de certains de leurs proches. Certains vivent de l’isolement parce que leur famille n’accepte pas leur orientation sexuelle ou leur identité de genre. Quand elles se retrouvent en perte d’autonomie, alors qu’elles auraient besoin d’un plus grand soutien de leur entourage, il faut offrir plus de services pour pallier cet isolement.
Au Canada, le terme « Autochtones » désigne les premiers peuples d’Amérique du Nord et leurs descendant-e-s. La Constitution canadienne reconnaît trois groupes de peuples autochtones : les Premières Nations, les Inuit et les Métis. Ces trois groupes distincts ont leur propre histoire ainsi que leurs propres langues, pratiques culturelles et croyances.
Comment le statut autochtone peut-il affecter la santé?
En moyenne, l’espérance de vie des personnes autochtones est de 14 ans plus basse que celle des non-autochtones. Cette disparité flagrante s’explique par de nombreux facteurs:
Le racisme
Il est indéniable que la santé générale des peuples des Premières Nations et des Inuit est inextricablement liée aux processus de colonisation et de décolonisation qui ont marqué l’histoire du territoire canadien.
Au-delà de l’aspect géographique de l’appropriation des terres, les Autochtones ont été soumis-e-s à un contrôle politique externe ainsi qu’à une dépossession économique liée à leurs moyens de subsistance (comme l’impossibilité de chasser et de pêcher). Ces peuples ont également subi une fracture culturelle à cause de la volonté du gouvernement canadien de les assimiler à la société blanche et majoritaire (par le biais, notamment, des pensionnats autochtones). Ce système de hiérarchisation des pouvoirs, des ressources et des libertés, qui a placé « les colons blancs » au-dessus des « colonisés autochtones » a créé ce que l’on appelle aujourd’hui un traumatisme historique. Ainsi, les persécutions vécues par les générations passées ont encore aujourd’hui des répercussions bien concrètes sur leurs descendant-e-s, sans oublier les impacts du racisme systémique qui perdure encore aujourd’hui.
Les conséquences de ce passé se traduisent notamment par un taux de violence et par un nombre de suicides dépassant largement les moyennes canadiennes. À titre d’exemple, 75 % des femmes vivant dans une réserve autochtone subissent de la violence familiale, ce qui a des effets dévastateurs sur leur santé et celle de leurs enfants. Quant au taux de suicide, quoique très variable d’une population autochtone à une autre, il est en moyenne trois fois plus élevé chez les individus des Premières Nations que chez les autres Canadien-enne-s. Le taux de suicide chez les Inuit est, quant à lui, neuf fois plus élevé que dans la population non-autochtone.
Logement
À la suite de la dépossession de leurs terres, les populations autochtones se sont vu imposer des milieux de vie nuisibles à leur santé, notamment dans les réserves. Le manque de logements, surtout abordables, qui provoque une promiscuité excessive ainsi que de l’itinérance en milieu urbain, est une réalité aux conséquences sous-estimées. Dans ces logements surpeuplés, les enfants n’ont pas de lieu propice aux études, au calme et au jeu. Cette situation provoque et accentue des problèmes d’apprentissage et de comportement. Les adultes, de leur côté, n’ont aucun espace privé, ce qui augmente le stress, les troubles en matière de santé mentale et la probabilité de toxicomanie. Les risques de transmission de maladies respiratoires et de blessures sont également aggravés par le surpeuplement de ces logements. Citons, à titre d’exemple, le cas de la communauté de Waswanipi qui a été construite sur un ancien marécage. Les logements qui s’y trouvent sont souvent inondés et peu entretenus, ce qui entraîne de la moisissure et une augmentation des maladies respiratoires chez les enfants de la communauté.
Alimentation
Parce que les réserves sont souvent situées dans des lieux éloignés, l’offre alimentaire à laquelle ont accès les populations autochtones est extrêmement réduite en variété et en quantité. Les aliments y sont très chers. En raison des coûts de transport, la disponibilité des produits frais se fait rare. De plus, les méthodes modernes de chasse coûtent si cher qu’elles sont devenues moins accessibles pour les peuples des Premières Nations et les Inuit. Les Autochtones sont quatre fois plus susceptibles de souffrir d’insécurité alimentaire que les autres Canadien-enne-s. Par le fait même, les personnes sont réduites à consommer des produits transformés et gras, ce qui cause des problèmes fréquents d’obésité et de diabète et affecte la santé cardiovasculaire et rénale.
Éducation et travail
Dans un tel contexte sanitaire, il est aisément compréhensible que l’éducation des jeunes soit hypothéquée. Dans les réserves, 40 % des hommes et 43 % des femmes étudient au niveau secondaire, alors que la moyenne des personnes non autochtones se situe autour de 70 %.
Bien entendu, cet état de fait ne peut qu’influencer négativement le taux d’emploi et les conditions de travail des Autochtones. Les individus issus des peuples autochtones sont moins susceptibles de faire partie de la population active et s’ils le sont, ils sont plus à risque d’être sur le chômage que leurs confrères et consœurs non autochtones. De plus, lorsqu’ils sont en emploi, leur salaire est moins élevé que celui du reste de la population canadienne. Ceci s’explique par le fait qu’il existe peu de débouchés économiques dans leurs milieux de vie ainsi que par de plus faibles taux de diplomation et d’alphabétisation. Le racisme et la discrimination à l’emploi vécue par les personnes autochtones hors réserve contribuent aussi à leur fort taux de chômage.
Accès à un système de santé
Le système de santé québécois a de la difficulté à prendre en compte la langue, la culture et les déterminants de la santé propres aux communautés autochtones, ce qui limite son utilisation. Par exemple, la place de nombreux membres de la famille lors de l’hospitalisation d’un-e patient-e autochtone peut ne pas être accommodée par l’hôpital, alors que leur présence est culturellement primordiale. De plus, l’accès à des médecins et à des dentistes est difficile dans plusieurs réserves et territoires des Premières Nations et des Inuit.
Le traumatisme historique vécu par des générations d’individus ainsi que le racisme systémique, qui perdure encore aujourd’hui, teintent fortement la perception du réseau public de santé et de services sociaux par les personnes autochtones. Ainsi, même si une professionnelle en soins adopte une attitude bienveillante et adéquate, il est possible que les appréhensions du-de la patient-e et son manque de confiance envers le système de santé affectent la dispensation des soins.
S’outiller
Si des formations individuelles sur la sécurisation culturelle sont utiles, c’est d’abord sur les facteurs structuraux des déterminants sociaux de la santé qu’il faut agir de manière urgente. L’amélioration de l’état de santé des personnes autochtones passe en partie par un meilleur accès aux services publics de santé, mais surtout par un rehaussement de l’ensemble de leurs conditions de vie (logement, emploi, éducation).
Depuis son Congrès de 2021, la FIQ appuie d’ailleurs le Principe de Joyce visant à garantir à tous les Autochtones un droit d’accès équitable, sans aucune discrimination, à tous les services sociaux et de santé, ainsi que le droit de jouir du meilleur état possible de santé physique, mentale, émotionnelle et spirituelle.
Pour en savoir plus:
Statistique Canada révèle que l’écart du niveau de diplomation postsecondaire entre les jeunes noirs et les autres jeunes est considérable au pays. Aussi, la proportion de personnes racisées sans emploi atteint près du double de la proportion de personnes blanches. De plus, pour chaque dollar gagné par la population générale, une personne issue d’une minorité racisée gagnera en moyenne 0,81 $. Comme on le sait, la diplomation, l’employabilité et la rémunération ont des incidences majeures sur la santé. Ainsi, « quand des minorités raciales sont en mauvaise santé, c’est donc souvent en bonne partie parce qu’elles sont pauvres. Mais ce premier niveau d’analyse en appelle immédiatement un second : si ces minorités sont pauvres, c’est souvent parce qu’elles sont victimes de racisme. »
Comment l’appartenance à un groupe ethnoculturel peut-elle affecter la santé?
Bien que certaines hypothèses offrent une explication génétique à la surreprésentation de communautés racisées aux prises avec certains problèmes de santé, il apparaît plus pertinent de s’intéresser aux causes sociales de ces problèmes de santé, puisque nous pouvons nous y attaquer.
Par exemple, les cas d’hypertension et de diabète sont plus nombreux dans les communautés racisées que dans la population générale. Or, le lien semble plus direct entre ces problèmes de santé et le statut socioéconomique ainsi que les défis reliés à l’insécurité alimentaire qu’avec l’appartenance ethnoculturelle en tant que telle. De plus, même si la disproportion de cas de ces maladies chez les communautés racisées est bien connue, l’offre de soins n’est pas toujours adaptée aux caractéristiques et aux besoins de la population. Prenons l’exemple de Montréal-Nord, arrondissement montréalais bien connu pour son caractère multiculturel : l’ensemble des cliniques présentes sur le territoire connaissent des défis de recrutement de personnel, si bien que seulement 50 % de la population rapporte être suivie par des services de première ligne.
De la même manière, des études rapportent davantage de problèmes respiratoires chez les communautés démunies et marginalisées. Or, à l’échelle mondiale, une majorité d’usines polluantes sont installées à proximité des quartiers densément peuplés par des minorités racisées. Il s’agit alors de racisme environnemental.
Il est aussi intéressant de s’attarder spécifiquement aux enjeux de racialisation et de santé mentale, car il est documenté que les communautés racisées sont à la fois plus à risque de développer des problèmes de santé mentale tout en ayant un accès limité aux soins. En effet, les études rapportent que la discrimination et le racisme ont des impacts mentaux, notamment en raison des nombreux mécanismes de survie développés et du fait d’être continuellement sur ses gardes à cause du profilage racial et d’autres discriminations. L’importance du phénomène a mené à l’utilisation du terme « stress traumatique sur une base raciale ». En plus d’avoir un accès aux services plus limité, que ce soit en raison de la barrière linguistique ou de l’emplacement géographique des services, les communautés ethnoculturelles rapportent aussi des problèmes quant à l’accueil qu’elles peuvent recevoir lorsqu’elles consultent.
Comme l’ensemble des acteur-trice-s du système de santé, les professionnelles en soins font face au défi d’accueillir des patient-e-s provenant de groupes ethnoculturels dans un système de santé pensé et mis en place avec des codes de la majorité blanche. Cela s’intègre dans ce qu’on appelle le « privilège blanc ». Si le terme peut sembler heurtant de prime abord, il apparaît important de le ramener à ce qu’il est, sans plus : un système selon lequel les principes de la majorité blanche constituent la façon logique d’organiser la vie humaine.
S’outiller
De nombreux exemples illustrent que le système de santé comporte lui aussi des composantes discriminatoires. Par exemple, le délai de carence de 90 jours imposé par la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) aux nouveaux-elles arrivant-e-s a pour conséquence que plusieurs feront le choix de reporter une consultation plutôt que de s’endetter. Les professionnelles en soins dénoncent cette situation, car cela peut aggraver l’état de santé des personnes si elles ne sont pas prises en charge à temps.
En tant qu’organisation dénonçant le racisme systémique, la FIQ prend aussi position en soutenant des organisations et coalitions :
Cas de figure
La pandémie de COVID-19 a illustré que l’appartenance ethnoculturelle est un facteur considérable d’inégalités en santé. En effet, la direction de la Santé publique de Montréal a suivi de près ce phénomène et a pu démontrer que le taux d’infection à la COVID-19 était environ 1,6 fois plus élevé dans les secteurs de l’île de Montréal où la proportion de personnes désignées « minorités visibles » est la plus grande. Le phénomène est aussi observé ailleurs. À Toronto, 83 % des cas positifs à la COVID-19 ont été recensés chez des résident-e-s racisé-e-s, alors que ces personnes ne représentent que 50 % de la population. Du côté des États-Unis, le taux de mortalité lié à la COVID-19 des Afro-américain-e-s a été 2,3 fois plus élevé que celui des personnes blanches.
Les problèmes de qualité de l’air tels que le smog et les pluies acides sont le résultat du rejet de polluants dans l’atmosphère. La majorité de ces polluants proviennent des activités humaines, notamment le transport, l’utilisation de combustibles pour l’électricité et le chauffage, et les activités industrielles. Les polluants de sources naturelles comme les feux de forêt peuvent parfois jouer un rôle important. La qualité de l’eau est un facteur de santé important. Sa qualité microbiologique et chimique est un enjeu permanent de santé publique que ce soit lorsqu’il s’agit de consommation (eau potable), d’utilisation aux fins d’hygiène, aux fins des loisirs (eaux récréatives) ou à d’autres usages pouvant entraîner une exposition humaine.
Comment la qualité de l’air et de l’eau affecte-t-elle la santé?
La qualité de l’air a des conséquences directes sur la santé des populations. En effet, une hausse des concentrations de polluants, de particules fines et de pollen entraîne aussi une augmentation des cas d’asthme, des problèmes respiratoires et cardio-vasculaires et des allergies. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) considère d’ailleurs la pollution de l’air comme le principal risque environnemental dans le monde.
En effet, il est estimé que la pollution atmosphérique est responsable d’un décès sur huit dans le monde. Les maladies cardio-vasculaires sont responsables de 80 % de ces décès. Cela s’explique par le fait que les particules fines et ultrafines inhalées par les poumons atteignent la circulation sanguine où elles causent une réaction inflammatoire et un stress oxydatif qui endommagent la paroi des vaisseaux et augmentent le risque d’événements cardiovasculaires. Quant à la pollution de l’eau, elle favorise la formation de bactéries Vibrio (ex. : choléra, campylobactéries) et la propagation d’infections parasitaires (ex. : cryptosporidiose).
Les changements climatiques ont une incidence importante sur la qualité de l’air et de l’eau. En effet, la variabilité des températures affecte la volatilisation et la remobilisation des contaminants chimiques dans l’atmosphère, les océans et les courants marins. Les différents contaminants chimiques se retrouvent ainsi dans la chaîne alimentaire et les communautés se retrouvent ainsi exposées à différents problèmes de santé.
De plus, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) soutient que l’augmentation des températures entraînera une hausse des fréquences et de l’intensité des précipitations abondantes d’ici les 30 prochaines années. Or, les fortes pluies entraînent des problèmes d’élimination des déchets fécaux, ce qui cause une augmentation des cas de diarrhées, de choléra, d’E. coli, de typhoïde et d’hépatite A. De plus, la hausse marquée des précipitations risque d’entraîner une élévation accrue du niveau des mers et de mener à une augmentation des épisodes d’inondation et d’infiltration d’eau, ce qui favorise la croissance de moisissures.
Plusieurs recherches font aussi valoir que l’augmentation de la fréquence des événements climatiques extrêmes tels que les inondations aura des impacts notables sur la santé psychologique et le stress post-traumatique chez les populations visées. Une étude québécoise portant sur les inondations de 2019 révèle d’ailleurs que 53 % des répondant-e-s faisaient face à un trouble de santé mentale un an après les événements.
Tous les humains ne sont pas égaux devant les enjeux liés aux changements climatiques ainsi qu’à la qualité de l’air et de l’eau. En effet, les personnes plus défavorisées économiquement sont plus largement exposées à des polluants atmosphériques, car elles vivent dans des quartiers situés plus près des grands axes routiers qui comprennent moins d’espaces verts, par exemple.
S’outiller
En 2021, les déléguées au congrès de la FIQ ont adopté une politique de développement durable. Les principes de solidarité et de développement durable sont transversaux. En ce sens, la FIQ appuie et participe à plusieurs réseaux et groupes qui militent pour la protection de l’environnement et donc pour une meilleure qualité de l’air et de l’eau.
Réseau intersyndical pour le climat
Front commun pour la transition énergétique
Cas de figure
Pensons par exemple à la mauvaise qualité de l’air dans les écoles du Québec qui a grandement contribué à la propagation de la COVID-19 chez les enfants et le personnel enseignant. La forte propagation de la COVID-19 et de tous autres problèmes respiratoires chez les enfants est d’ailleurs la cause principale de la crise dans les urgences pédiatriques vécues à l’automne 2022. Ainsi, on observe une incidence directe sur les professionnelles en soins, leur charge de travail et leur capacité à bien prendre soin de leurs patient-e-s.
De plus, la qualité de l’eau et de l’air dans un secteur géographique spécifique peut grandement affecter le type de soins requis dans ce secteur. Par exemple, dans le centre-ville de Rouyn-Noranda, en Abitibi-Témiscamingue, la Fonderie Horne rejette des polluants cancérigènes comme l’arsenic, le cadmium, le nickel et le plomb. Les taux de cancers du poumon, de la peau, des reins et de la vessie sont beaucoup plus élevés dans cette ville par rapport au reste du Québec. Cela vient donc directement affecter le type de soins nécessaires dans la région et la quantité de personnel requis en oncologie, par exemple.
Le logement fait référence à un ensemble de pièces d’habitation; c’est le principal milieu de vie où ont lieu les activités domestiques et familiales. Ce milieu a une incidence sur la santé et le bien-être des personnes qui y vivent, tant sur les plans physique, mental et social. Le droit au logement est reconnu et encadré dans les différentes Chartes des droits et le Code civil. La discrimination pour l’accès à un logement y est en principe interdite, pourtant elle continue de sévir, au détriment des personnes vulnérables et discriminées sous divers motifs.
Comment les conditions de logement affectent-elles la santé de la population?
L’habitation occupe une part importante dans la vie et la santé des personnes. Il s’agit d’un secteur d’activités dans lequel l’État doit intervenir, ce qui n’a pas été fait suffisamment dans les dernières décennies, notamment en ne construisant pas assez de logements sociaux et en encadrant peu les propriétaires du marché locatif, laissant ainsi se détériorer la santé d’une bonne partie de la population. Avec les crises successives du logement, le faible taux de disponibilité et la hausse des prix des loyers, se loger adéquatement selon ses besoins devient de plus en plus difficile.
Des logements précaires ou inadéquats entraînent des conséquences considérables sur la santé des habitant-e-s. Un logement qui comporte de la moisissure est plus susceptible d’affecter les jeunes enfants, les personnes âgées et les personnes atteintes de problèmes respiratoires. La moisissure peut aussi entraîner une fatigue dont la cause ne sera pas détectée immédiatement. Sur l’île de Montréal, plus de 10 000 enfants souffrent d’asthme, d’infections respiratoires et de rhinite hivernale en lien avec les conditions d’humidité excessive dans leur logement.
Aussi, le coût élevé du logement réduit la disponibilité des ressources financières pour se procurer d’autres biens essentiels. Couper dans la nourriture ou devoir couper le chauffage pour économiser sont des gestes du quotidien qui affectent la santé des personnes touchées. Cette situation est une source de stress importante pour les ménages, ce qui contribue à détériorer l’état de santé physique et mentale des personnes. Un logement surpeuplé peut aussi entraîner son lot de difficultés, on n’a qu’à penser aux conditions de sommeil ou aux conditions d’apprentissage d’enfants d’âge scolaire.
Évidemment, le fait de ne pas bénéficier d’un logement et d’être en situation d’itinérance est en général associé à des problèmes de santé physique et mentale importants. Des approches de soins particulières sont développées pour les personnes itinérantes – incluant des programmes comprenant l’accès à un logement pour qu’elles puissent s’y enraciner.
Pour les personnes aînées, avoir accès à un logement adéquat est fondamental et peut déterminer si une personne peut rester chez elle ou doit aller vivre dans une résidence pour personnes âgées. Malheureusement, selon l’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées (AQDR), la grande majorité des habitations au Québec sont très peu accessibles universellement. L’accessibilité universelle prend en compte les besoins de ceux qui voient moins bien, entendent moins bien, se déplacent ou comprennent différemment afin d’aménager des lieux fonctionnels pour tous et toutes, quelle que soit leur condition.
S’outiller
Reconnaissant la nécessité d’agir sur le logement pour améliorer la santé de la population, la FIQ s’est positionnée au cours des années en faveur d’une intervention accrue de l’État dans le domaine de l’habitation, notamment en appuyant les demandes des partenaires communautaires qui œuvrent pour le droit au logement.
Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU)
Regroupement des comités logement et des associations de locataires du Québec (RCLALQ)
Cas de figure
Les conditions de logement des patient-e-s ont un impact important sur le travail des professionnelles en soins. Pensons, par exemple, à une personne aînée qui fait une chute et qui vit dans un logement non adapté à ses besoins. Son retour à la maison n’est peut-être plus possible après son épisode de soins et cela va considérablement affecter sa santé psychologique lors de son hospitalisation ainsi que son niveau de collaboration avec le personnel soignant.
Pensons aussi à une famille qui vit dans un logement insalubre. Même si cela affecte sa santé, la famille peut être dans l’impossibilité de quitter le logement faute de moyens financiers. Ces membres se retrouvent à avoir régulièrement besoin de soins pour des rhinites sévères, des allergies ou encore, des problèmes respiratoires qui s’aggravent constamment. C’est une situation qui peut être confrontante comme professionnelle en soins. Les messages de prévention doivent être adaptés au fait que la famille ne contrôle pas la qualité de son logement.
Évidemment, il est clair que les soins prodigués à une personne en situation d’itinérance doivent être adaptés à ses besoins et à sa condition. Celle-ci n’aura pas facilement accès à une salle de bain pour bien nettoyer une plaie ou ne bénéficiera pas d’un endroit sécuritaire pour reprendre des forces et se reposer après un épisode de soins.
L’aménagement du territoire, c’est l’ensemble des modifications effectuées par l’activité humaine sur l’environnement naturel. Cela inclut le système de transport, l’accès à différents services, la présence de parcs et d’espaces verts, les infrastructures en place, etc.
Comment l’aménagement du territoire affecte-t-il la santé de la population?
Un territoire dont l’aménagement a été pensé pour permettre à sa population de bien manger, de rester active et de se sentir en sécurité permettra de prévenir différents problèmes de santé. La qualité de vie et la santé physique et mentale de la population comportent plusieurs dimensions. Elles varient grandement selon la façon dont les villes et les villages du Québec se sont développés, selon que l’on vive en milieu rural ou en milieu urbain.
Le développement économique : La présence d’industries polluantes est associée à plus de risques de maladies (ex. : présence de l’industrie de l’amiante, usage répété de pesticides en monoculture, zones industrielles et métaux lourds, etc.).
Le transport : Autobus, métro, pistes cyclables, trottoirs sécuritaires; la qualité du système de transport joue un rôle dans la possibilité de se déplacer activement et d’ainsi diminuer la sédentarité, aidant du même coup à prévenir l’obésité, les maladies cardiovasculaires et le diabète. La population vivant à proximité d’autoroutes peut subir les inconvénients d’une mauvaise qualité de l’air ou de bruit excessif et développer, par exemple, des maladies pulmonaires. Le transport a aussi un impact sur l’accès aux services de santé.
Accès aux services : L’éloignement des services publics entraîne des difficultés d’accès à des soins et à des services spécialisés, tout comme des difficultés d’accès à un réseau de soutien, formé des proches et des ressources communautaires. De plus, de nombreux secteurs peuvent être désignés comme un désert alimentaire, car il y est difficile de s’approvisionner en aliments de qualité à un prix raisonnable, ce qui a un impact important sur la santé.
Infrastructures et espaces verts : Les parcs sont des lieux sociaux, qui diminuent le bruit, le stress et la pollution de l’air grâce aux arbres matures. En ville, les parcs ont un impact direct sur la diminution des îlots de chaleur, ce qui est bénéfique pour les personnes plus vulnérables, notamment en période de canicule. La présence d’infrastructures sportives dans une communauté permet aussi à la population d’être plus active, améliorant ainsi la santé physique et mentale.
Ensemble, ces différentes composantes de l’aménagement du territoire affectent la santé de la population et diminuent notamment la prévalence d’obésité, de diabète, de maladies pulmonaires et cardiovasculaires et d’anxiété. Cela se répercute sur le système de santé : non seulement l’engorgement des urgences, le nombre d’hospitalisations, les comorbidités et la complexité des cas diminuent, mais la capacité des individus à se rétablir rapidement est meilleure et la durée de leur séjour à l’hôpital est plus courte.
En plus d’accaparer des budgets publics et privés importants, les choix qui sont faits en matière d’aménagement du territoire ont des répercussions à long terme : se préoccuper collectivement d’un aménagement qui favorise la santé physique et mentale est primordial.
S’outiller
En tant qu’organisation syndicale du domaine de la santé, la FIQ défend des conditions de vie décentes pour tous et toutes et cela passe par un aménagement du territoire sain et respectueux des communautés. Elle le fait notamment en participant à des coalitions, en s’alliant à des partenaires ou en appuyant des groupes actifs dans ce domaine :
Front commun pour la transition énergétique
Association québécoise des médecins pour l’environnement (AQME)
Réseaux de soutien social
Le soutien social procure plusieurs bienfaits pour la santé. Entre autres, les personnes qui en bénéficient peuvent se confier lorsqu’elles éprouvent des difficultés et recevoir de l’aide au besoin. L’état de santé serait aussi positivement associé à l’appartenance à des organismes, à la réciprocité (le fait de donner et de recevoir de l’aide) et à des activités de bénévolat.
L’environnement social exerce une énorme influence sur la santé physique en général. Les études démontrent que les interactions positives avec la famille, les ami-e-s ou les collègues et le soutien émotionnel et physique de l’entourage augmentent de 30 à 80 % l’espérance de vie des personnes. À l’inverse, l’isolement social est associé à une hausse du risque de plusieurs maladies, en particulier les maladies cardiovasculaires, et à une hausse d’environ 50 % de la mortalité globale, soit un risque similaire à celui associé à des facteurs de risque bien connus comme l’obésité, l’hypertension ou la sédentarité. L’isolement social est perçu comme une forme d’agression par le corps et provoque l’activation de mécanismes physiologiques impliqués dans la réponse au stress. Les études montrent également que les personnes qui sont isolées tendent à adopter des comportements plus néfastes pour la santé comme le tabagisme, la sédentarité ou l’abus d’alcool, contribuant ainsi à diminuer leur espérance de vie.
Les taux de mortalité de plusieurs maladies sont plus élevés chez les personnes qui ont un réseau social pauvre. Il existe une corrélation entre le manque de soutien social et différents aspects de la santé mentale, notamment la dépression. Il existe également un certain réconfort associé au fait non seulement de recevoir du soutien social, mais également d’en offrir. La réciprocité peut ainsi jouer un rôle positif dans les effets de soutien social. Un réseau social favorable entraîne une santé mentale positive et à l’inverse, un faible soutien social est clairement associé à un niveau élevé de détresse psychologique.
Comment le réseau de soutien social peut-il affecter la santé?
En tant que professionnelles en soins, le soutien des proches est régulièrement nécessaire lors des interventions auprès des patient-e-s. Que ce soit pour répondre à certaines questions, valider des informations, faire de l’enseignement, s’assurer de la compréhension, le réseau de soutien social a une importance capitale.
De plus, l’importance des relations sociales est de plus en plus démontrée en neuroscience : les interactions sociales sont associées au maintien d’une santé cérébrale en vieillissant et les personnes qui sont isolées peuvent développer des troubles cognitifs. Quand les personnes détectent des problèmes de mémoire, elles auront tendance à se retirer socialement, de façon consciente ou non, alors qu’elles devraient au contraire conserver des relations sociales. Cet isolement aura pour incidence d’aggraver les troubles cognitifs et la personne aura de plus en plus de difficulté de compréhension.
Lorsque la personne est isolée, il faut alors faire preuve de créativité pour organiser des soins et des services : transport pour les rendez-vous médicaux, rappels pour la médication, soutien pour les tâches domestiques. La présence d’un entourage bienveillant aide beaucoup dans le maintien de l’autonomie.
Soutenir un proche malade ou en perte d’autonomie exige une grande responsabilité et entraîne une charge mentale importante, particulièrement si la personne est déjà isolée. Il faut donc s’assurer que les personnes conservent des relations significatives sur lesquelles elles peuvent s’appuyer au besoin.
S’outiller?
En tant qu’organisation syndicale solidaire des causes sociales et prônant une société équitable, la FIQ s’implique pour le renforcement des réseaux de soutien social. En ce sens, elle milite aux côtés des organisations et coalitions suivantes :
Collectif pour un Québec sans pauvreté
Éducation et alphabétisme
« L’éducation est l’apprentissage et le développement des facultés intellectuelles, morales et physiques, les moyens et les résultats de cette activité de développement. » Évidemment, l’éducation peut faire référence à un cadre très large de connaissances et de compétences à la fois intellectuelles, sociales, affectives, sportives, etc. Toutefois, pour étudier l’influence de ce déterminant social sur la santé, nous faisons d’abord et avant tout référence à un système d’éducation structuré incluant des accès à des services éducatifs de la petite enfance, des écoles de différents niveaux scolaires, des professeur-e-s et du personnel de soutien et spécialisé ayant les outils nécessaires pour accompagner toute personne qui le souhaite, mais plus particulièrement les enfants, dans leur apprentissage.
Comment l’éducation et l’alphabétisme peuvent-ils affecter la santé?
Une éducation de qualité est à la base de la santé et du bien-être et joue un rôle majeur dans la prévention des maladies. Pour pouvoir mener une vie en bonne santé, chacun-e doit posséder les connaissances nécessaires pour lui permettre de faire des choix de vie sains et prendre de bonnes décisions relativement aux soins de santé. Il existe aussi des liens importants entre l’alphabétisation et la santé. Le développement de compétences en lecture, en écriture et en calcul, est un outil essentiel qui permet aux personnes d’acquérir les connaissances et l’autonomie nécessaires pour mieux prendre soin de leur santé et s’accomplir dans un monde en rapide évolution.
D’autre part, le système d’éducation structure le cheminement des tout-petits jusqu’à l’âge adulte. Il leur offre diverses occasions d’apprentissage dont ils-elles auront besoin pour développer et maintenir leurs capacités cognitives, physiques, émotionnelles et sociales. Les institutions scolaires constituent des milieux de vie dont l’aménagement, par diverses mesures, est susceptible d’influencer la santé physique et mentale de ses clientèles. Il s’agit de lieux significatifs pour favoriser le développement de saines habitudes de vie, à la fois pour la santé physique que mentale. Finalement, il est clair que sans une éducation minimale, il est difficile d’occuper un emploi, d’obtenir un revenu décent et même d’avoir accès à un logement.
L’analphabétisme entraîne des répercussions quotidiennes sur le travail des professionnelles en soins. De plus, elles sont aux premières loges pour en percevoir les ravages sur la santé de la population. Les principaux moyens de communication utilisés sont souvent sous forme écrite : dépliants, fiches d’informations, courriels, sites Web ou réseaux sociaux. Plusieurs outils utilisés habituellement deviennent inutiles si la personne n’est pas en mesure de les comprendre, ce qui complexifie grandement l’intervention. Les professionnelles en soins doivent alors faire de l’enseignement différemment à une personne sur la gestion de sa maladie, sa médication, ses soins, etc.
S’outiller?
En tant qu’organisation syndicale incontournable dans le domaine de la santé, la FIQ défend l’accessibilité, la qualité et l’universalité des services publics tant en santé et services sociaux qu’en éducation.
L’éducation populaire et citoyenne étant indispensable au développement d’une pensée critique et à la construction d’un lien social et solidaire au sein de la société, la FIQ s’implique dans des groupes et des coalitions qui luttent pour une accessibilité à une meilleure éducation à la population.
Emploi et conditions de travail
Par « emploi » on entend le fait qu’une personne active dans la population occupe une ou des activités économiques. Il s’agit souvent d’un contrat passé entre deux parties, l’employeur et le salarié, pour la réalisation d’un travail contre une rémunération.
Comment l’emploi et les conditions de travail peuvent-ils affecter la santé?
Le travail constitue un pan important de la vie de tout adulte. En tant que tel, il conditionne grandement le rythme de vie et l’environnement dans lequel une personne évolue. Par exemple, avoir ou non un emploi a, en soi, un impact considérable sur la santé des individus. Lorsqu’une personne se retrouve sans emploi, plusieurs sphères de son quotidien sont ébranlées. Il a été démontré que le fait d’être sans emploi influence négativement la santé en raison du faible revenu associé à cette situation, au stress qui en découle, à l’isolement social ainsi qu’à l’adoption de comportement à risque (tels que le tabagisme et la consommation d’alcool), à la dépression et à un taux de suicide accru.
Pour celles et ceux qui ont un emploi, ce sont les conditions dans lesquelles elles-ils l’exercent qui ont une influence sur leur état de santé. Plusieurs travailleurs, et particulièrement des travailleuses, occupent des emplois dits précaires, caractérisés par des heures atypiques, des quarts de travail intensifs, une charge de stress importante et pour lesquels des risques de blessure s’avèrent graves. Saviez-vous que le travail excessif peut être à l’origine de problèmes de santé comme la haute pression et les maladies cardiaques, la détresse psychologique et des difficultés de sommeil? Une étude menée dans cinq pays auprès de 13 000 femmes démontre également que le risque de développer un cancer du sein est de 12 % à 80 % plus élevé chez les travailleuses de nuit, surtout avant la ménopause.
Il est d’ailleurs reconnu que les organisations syndicales permettent de mieux équilibrer le pouvoir de l’employeur face aux salarié-e-s. De manière générale, les travailleur-euse-s syndiqué-e-s ont de meilleures chances d’avoir un salaire plus avantageux, d’obtenir des avantages sociaux et d’améliorer leurs conditions de travail. À titre d’exemple, les femmes œuvrant dans des milieux syndiqués ont, en moyenne, un salaire de 36 % plus élevé que leurs consœurs qui occupent des emplois non syndiqués.
À titre de soignantes, les membres de la FIQ constatent également les problèmes de santé que vivent les travailleur-euse-s accidenté-e-s, les personnes ayant perdu leur emploi ou encore les personnes qui occupent des emplois précaires qui nuisent à leur santé. Par le fait même, la FIQ s’implique dans plusieurs organisations communautaires, syndicales et politiques pour revendiquer auprès du gouvernement des conditions de vie minimales aux travailleur-euse-s non syndiqué-e-s, ou en situation précaire ou aux personnes sans emploi.
S’outiller
En tant qu’organisation syndicale, la FIQ agit quotidiennement pour défendre les conditions de travail de ses membres, tant au plan salarial qu’aux plans de la pratique professionnelle, de l’organisation du travail et de la santé et de la sécurité au travail. La FIQ appuie également une augmentation du salaire minimum, est membre du Centre international de solidarité ouvrière (CISO) et prend part année après année aux activités de Coalition du 1er mai, dans le cadre de la Fête des travailleurs.
Collectif pour un Québec sans pauvreté
Cas de figure
Des recherches récentes ont démontré que le déséquilibre qui peut exister entre les demandes de l’employeur (pression pour exécuter les tâches plus rapidement, charge de travail importante, responsabilités prenantes) et la reconnaissance qu’en retirent les travailleur-euse-s (salaires, respect) pouvait dans bien des cas mener à des problèmes de santé. Cela vous fait-il penser à une catégorie de professionnelles en particulier? En effet, les professionnelles en soins occupent des emplois extrêmement stressants, pour lesquels les conditions de travail sont plus que difficiles.
Le manque de reconnaissance trop fréquent des employeurs et du gouvernement exacerbe également les problèmes vécus par les professionnelles en soins, et leur santé, tant physique que mentale, en est affectée. Pour le réseau de la santé du Québec, le ratio d’assurance salaire, c’est-à-dire le nombre d’heures payées en assurance salaire par rapport aux heures travaillées, a fait un bond de 24 % entre 2014-2015 et 2019-2020. Comme quoi, la restructuration et les compressions que le réseau a subies dans les dernières années entraînent des conséquences directes sur la santé des professionnelles en soins.
Le revenu
Le revenu fait référence au montant monétaire que perçoit une personne par le biais du travail (salaire) ou de la propriété/capital (placement financier, loyers) en vue de répondre à ses besoins essentiels (logement décent, alimentation, etc.).
Les recherches démontrent largement les effets des inégalités économiques, spécifiquement de la pauvreté, sur la santé des personnes. Autrement-dit, plus le niveau de revenu est bas, plus la santé d’une personne est mauvaise. Les conséquences se traduisent, par exemple, par des maladies physiques et mentales, des incapacités précoces, voire, une diminution de l’espérance de vie.
Fait inquiétant : les inégalités de revenus n’ont cessé d’augmenter depuis 40 ans, ce faisant les 1 % des plus riches gagnent plus de deux fois les revenus cumulés de la moitié la plus pauvre de la population mondiale.
Comment le revenu peut-il affecter la santé?
Le revenu d’une personne constitue le déterminant de santé le plus important, puisqu’il exerce une influence sur l’ensemble des conditions et des habitudes de vie. De plus, le revenu exerce une influence sur constitue un moyen d’accès a autres déterminants sociaux de la santé, dont l’education.
Les impacts du revenu sur la santé se manifestent de manière différenciée au regard de facteurs de genre, identitaires et sociaux : des effets qui frappent plus sévèrement parmi personnes au bas de l’échelle sociale (dont les femmes, les personnes racisées les autochtones, etc.) et les enfants.
- Statistique salaire moyens F/H
- Statistique salaire moyen personnes racisées et autochtones
- Statistique femmes travaillent le plus à temps partiel et au salaire minimum
L’OMS soutient que les inégalités économiques « tuent à grande échelle » et que ce lien de causalité alimente une situation de dépendance dans les deux sens, c’est-à-dire que la pauvreté affecte la santé d’une personne et la mauvaise santé entretient la pauvreté.
En terme, d’espérance de vie, le constat est inquiétant : l’écart entre le groupe le plus défavorisé de la population et celui le plus favorisé est de 8,1 ans chez les hommes et de 3,9 ans chez les femmes.
Témoins au quotidien des effets des inégalités de revenus sur la santé, nos professionnelles en soins sont régulièrement appelées à procurer des soins dans un milieu peu humanisé. Or, en réponse aux réalités personnelles des usager-ère-s, elles doivent porter une intervention plus globale et personnalisée pour maintenir des soins de qualité et sécuritaires. Ce mode d’intervention empathique ne s’arrime pas, malheureusement, avec les exigences de performance et de résultat demandées par les gestionnaires.
S’outiller?
Pour contrer les effets du revenu, autrement dit de la pauvreté, sur la santé d’une personne, une intervention du gouvernement est nécessaire en vue de mettre en œuvre des leviers pour lutter contre ce fléau social. Parmi les moyens a prioriser, nommons : un soutien au revenu suffisant pour que tout le monde puisse couvrir ses besoins essentiels; des services publics universels, de qualité, accessibles; la réduction des inégalités entre les riches et les pauvres; et un salaire minimum qui permet de sortir de la pauvreté.
En somme, la réduction des inégalités entre les riches et les pauvres est le levier incontournable pour contrer la pauvreté, et ce, par le biais de la révision du régime fiscal à la base de cette répartition. Autrement dit, une augmentation du nombre de paliers d’imposition ferait que les mieux nantis de notre société paient leur juste part d’impôt dans le but de financer adéquatement des programmes pour soutenir les populations vulnérables ainsi que les services publics.
Cas de figure
Une femme qui travaille au revenu minimum ne peut se loger dans un logement convenable ou se nourrir sainement, ce qui entraînera des conséquences sur sa santé. Ce faisant, celle-ci pourrait se retrouver dans une situation où elle ne sera plus en mesure de travailler en raison de sa mauvaise santé. De plus, en raison de cette mauvaise santé, elle ne pourra pas amorcer sa recherche d’emploi et ni envisager un retour aux études afin de s’outiller pour briser le cycle de pauvreté.
L’insécurité alimentaire
Alors que les aliments produits à l’échelle de la planète pourraient nourrir toute la population mondiale, il y a près de 700 millions de personnes qui sont sous-alimentées[1]. Les conflits armés, les changements climatiques et les crises économiques sont au premier rang des raisons qui font que tant de gens souffrent sévèrement de la faim. Les personnes qui en paient le prix fort sont les femmes et les enfants. Paradoxalement, les personnes qui exercent une activité agricole sont également parmi les plus touchées. La mauvaise répartition des ressources est en effet au cœur des problèmes de l’alimentation mondiale.
Au Québec, comme ailleurs en Occident, les causes de l’insécurité alimentaire sont rattachées à plusieurs déterminants : le revenu, en premier lieu, mais aussi l’aménagement du territoire, le prix des logements et plus particulièrement, l’environnement alimentaire. La situation est par ailleurs aujourd’hui exacerbée par la pandémie et l’augmentation récente du coût des aliments. En seulement un an, le nombre de personnes qui fréquentent les banques alimentaires québécoises a bondi de 30 % pour s’établir à 872 000 personnes par mois. Il s’agit d’un bond de 73 % par rapport au bilan prépandémique de 2019. Dans les régions plus éloignées, le coût de l’alimentation est décuplé par les frais de transport. Dans certains quartiers urbains, l’offre alimentaire est très réduite, et ce sont les dépanneurs qui remplacent souvent l’épicerie, en offrant des aliments peu variés dont le coût est très élevé.
S’outiller
Puisque le revenu est directement lié à la capacité de se procurer des aliments, la fin de l’insécurité alimentaire pour tous et toutes s’inscrit nécessairement dans un projet collectif, soit la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Cette mission ne doit pas être simplement celle de quelques organismes communautaires, mais bien un enjeu commun à toutes les sphères de la société.
Devant l’augmentation sans cesse croissante des demandes auprès des banques alimentaires, même chez ceux et celles qui ont un salaire, le Collectif pour un Québec sans pauvreté, duquel la FIQ est membre, multiplie les interventions pour que l’État prenne ses responsabilités et agisse en matière d’insécurité alimentaire par exemple, en augmentant le salaire minimum et en haussant les protections publiques.
Pour en savoir plus :
Système de santé et services sociaux
Comment le système de santé et de services sociaux peut-il affecter la santé?
L’accès à des services de santé et à des services sociaux de qualité influence l’état de santé général de la population. Le système de santé et de services sociaux comprend des services curatifs, préventifs, de première ligne, spécialisés ainsi que des programmes de santé publique. Des actions menées en promotion de la santé et en prévention des maladies peuvent contribuer à réduire l’impact de certains facteurs représentant un risque pour la santé des individus.
Au Québec, les soins de santé doivent être gratuits et accessibles à tous et toutes sans égard au revenu ou au statut social de la personne. La gratuité et l’accessibilité d’un système de santé sont des déterminants de la santé majeurs. En effet, les données de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) sur la santé nous permettent de constater que dans les pays qui offrent des soins gratuitement, comme le Canada, l’espérance de vie est meilleure que dans des pays où certaines personnes n’ont pas accès aux soins, faute d’un revenu suffisant. Malheureusement, au Québec, nous devons encore payer pour différents services comme les soins dentaires, les services d’optométrie et les lunettes ou encore pour les services de différents professionnels, comme les physiothérapeutes. Avec la nouvelle Loi visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace, adoptée le 9 décembre 2023, l’accès aux services publics sera davantage compromis. En effet, le gouvernement du Québec considère dorénavant que l’accès aux soins peut se faire à la fois au sein des établissements publics du réseau de la santé et auprès de prestataires privés qui s’enrichissent au détriment des besoins de santé de la population, à cause de la déficience de notre réseau public.
Finalement, la vision politique que développent les gouvernements face à leur système de santé a un impact important sur l’accès aux soins, car elle en structure l’organisation, la gestion et la planification. En effet, un financement adéquat du système de santé est fondamental pour pouvoir réellement offrir des soins de qualité à la population. Au Québec, les différentes réformes et le désinvestissement de l’État en santé ont entraîné des conséquences majeures sur l’accessibilité des soins, leur qualité et la disponibilité des professionnelles en soins. De plus, si les dirigeants privilégient un modèle inspiré de l’entreprise privée, il est à prévoir que l’efficacité en termes de temps et d’investissement sera privilégiée au détriment de l’accès et de la qualité des soins et des services offerts. Il ne faut pas non plus négliger l’impact des décisions politiques qui tendent, depuis plusieurs décennies, à favoriser une vision hospitalo-centrée et curative, au détriment d’une approche multidisciplinaire et préventive. Les politiques centralisatrices des systèmes de santé, qui permettent d’améliorer le contrôle des gestionnaires sur les ressources humaines et les coûts, contribuent à diminuer l’accès à certains soins, particulièrement en régions éloignées.
S’outiller
La FIQ s’implique au sein de plusieurs coalitions et groupes qui militent en faveur de l’accès aux soins de santé, dont la Coalition solidarité santé.
Cas de figure
Après 15 ans de centralisation, l’Alberta vient de reculer, face au constat d’échec que la province tire de sa plus récente réforme de son réseau de santé. En comparaison des autres provinces, elle arrive 5e pour l’accès aux médecins, 7e pour l’accès aux infirmières, 6e pour le nombre de lits dans les hôpitaux, 5e pour l’accès aux examens d’imagerie par résonance magnétique et 8e pour l’accès aux examens de tomodensitométrie. La province de l’Ouest a ainsi un taux plus élevé de réadmissions à l’hôpital à la suite de soins chirurgicaux, un ratio plus élevé de mortalité hospitalière et un taux de décès plus élevé à la suite d’une chirurgie majeure.
En tant qu’organisation syndicale représentant 80 000 professionnelles en soins dans le réseau de la santé du Québec, la FIQ défend depuis sa création les valeurs d’universalité, d’accessibilité et de gratuité des soins. Cette vision s’incarne par son implication à défendre sur la place publique le réseau public de santé et ses membres.