Soutien aux professionnelles en soins : entre espoir et défis pour le réseau de la santé
Julie Bouchard
Présidente
22 janvier 2025
Chaque année, pendant que la population retourne au travail au début de janvier, le personnel du réseau de la santé reste mobilisé, offrant soins et réconfort à celles et ceux qui traversent des moments difficiles. Cette réalité est d’autant plus marquante en cette période où, avec l’entrée en vigueur du nouveau contrat de travail pour les 80 000 professionnelles en soins, il devient crucial de mettre en lumière les défis persistants qui entravent le bon fonctionnement du réseau de la santé.
Malgré les mesures négociées pour améliorer nos conditions de travail, le gouvernement de la Coalition avenir Québec continue d’exiger toujours davantage de la part des professionnelles en soins : plus d’heures, plus de sacrifices, souvent au détriment de notre équilibre personnel.
Dès les premiers jours de janvier, une période critique marquée par une forte affluence dans les urgences, le gouvernement a pris des décisions inquiétantes : abolition de postes clés, retardement d’embauches et réduction des heures travaillées dans le réseau. Ces choix, en totale contradiction avec les priorités affichées par le gouvernement, interviennent alors que les hauts dirigeants de Santé Québec s’installent lentement à la tête de la gestion du réseau, laissant perplexes les professionnelles en soins et la FIQ.
Pour l’année 2025, la FIQ aspire à davantage de stabilité pour ses membres. Cependant, les abolitions massives et le gel de postes récemment annoncés éloignent cet objectif. Alors que les besoins en soins de santé augmentent partout, la pénurie de personnel persiste. Il est même rapporté qu’un haut dirigeant de la fonction publique a mis en garde la présidente de Santé Québec, Geneviève Biron, contre les impacts négatifs des compressions sur le soutien à domicile.
Les récentes décisions génèrent une instabilité décourageant les nouvelles générations de professionnelles en soins, principalement des femmes, de rejoindre le réseau public. L’abolition de postes et le manque de planification à long terme rendent cette carrière moins attrayante, surtout dans un secteur où les conditions de travail sont précaires et où la charge mentale et physique est souvent ignorée. Les statistiques sont préoccupantes : près de 30 % des infirmières et 35 % des infirmières auxiliaires quittent le réseau en cinq ans, un phénomène amplifié par une pénurie imminente d’inhalothérapeutes. Ces défis renforcent les obstacles spécifiques rencontrés par les femmes dans ce secteur essentiel.
Face à ce manque de planification, la FIQ a obtenu dans la nouvelle convention collective un engagement de la part du gouvernement à mettre en place des ratios sécuritaires. Un comité a été formé pour concrétiser cette promesse. Toutefois, une planification rigoureuse des besoins, adaptée aux réalités démographiques, n’a pas été effectuée depuis près de 25 ans. Or, cette démarche est essentielle pour garantir un réseau efficace, accessible et attrayant pour celles et ceux qui choisissent de s’y investir.
Les conditions de travail demeurent au cœur de l’attractivité du réseau. Pourtant, malgré les promesses répétées, le temps supplémentaire obligatoire (TSO) reste une pratique omniprésente. À l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont, plus de 20 TSO ont été enregistrés en une seule journée en décembre dernier. Il est plus que jamais urgent d’éliminer cette pratique, mais force est de constater qu’elle reste toujours une réalité bien présente.
La FIQ appelle également le ministre de la Santé, Christian Dubé, à respecter son engagement de réduire les listes d’attente en chirurgie. Bien que 60 millions $ aient été prévus dans le contrat de travail pour atténuer les retards, les professionnelles en soins sont prêtes à contribuer à cet effort. Cependant, au lieu de maximiser l’offre publique, le gouvernement a choisi d’élargir le recours aux cliniques privées, une décision qui alourdit le fardeau financier de l’État et des citoyen-ne-s.
Dans un contexte où le ministre Dubé a imposé une directive de couper 1,5 milliard $ dans le réseau, la FIQ exhorte ce dernier à revoir sa position. Les contraintes budgétaires ne doivent jamais se faire au détriment des soins à la population. La FIQ est déterminée à mettre à profit son expertise pour bâtir un réseau public solide et stable, tout en évitant les décisions à court terme qui ne feraient qu’aggraver la situation. Cette approche doit être privilégiée plutôt que de recourir à des consultants coûteux, souvent déconnectés des réalités du terrain.
En ce début d’année, alors que nous, professionnelles en soins, continuons de veiller sur le réseau de la santé, je tiens à vous adresser mes meilleures pensées, ainsi qu’à toutes les membres du personnel de santé et aux personnes malades. Il est plus que jamais temps de travailler collectivement à des solutions durables et humaines, car la santé ne se négocie pas.